La procédure en cas d’engagement de la responsabilité financière devant la Cour des comptes.

Par Cornélie Durrleman, Avocate.

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Explorer : # responsabilité financière # procédure judiciaire # cour des comptes # instruction judiciaire

Cet article offre une vue d’ensemble détaillée sur la procédure en cas d’engagement de la responsabilité financière devant la chambre du contentieux de la Cour des comptes. À travers un examen des articles du Code des juridictions financières, il explique le rôle des différentes autorités compétentes pour déférer des faits potentiellement infractionnels, ainsi que le processus d’instruction et de jugement. Il éclaire aussi sur les mécanismes d’appel en cas de contestation des décisions rendues par la Cour des comptes.

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Partie 1 : déférés et suites données aux déférés.

Saisine du ministère public près la Cour des comptes.

Aux termes de l’article L142-1-1 du Code des juridictions financières ont qualité pour déférer au ministère public des faits susceptibles de constituer des infractions (articles L131-9 et L131-15 du Code des juridictions financières) :

  • Le président du Sénat ;
  • Le président de l’Assemblée nationale ;
  • Le Premier ministre ;
  • Le ministre chargé du budget ;
  • Les autres membres du Gouvernement pour les faits relevés à la charge des fonctionnaires et agents placés sous leur autorité ainsi que des agents exerçant dans des organismes placés sous leur tutelle ;
  • La Cour des comptes ;
  • Les chambres régionales et territoriales des comptes ;
  • Les procureurs de la République ;
  • Le représentant de l’État dans le département pour les faits ne relevant pas des ordonnateurs de l’État ;
  • Le directeur régional, départemental ou local des finances publiques pour les faits ne relevant pas des ordonnateurs de l’État ;
  • Les personnes mentionnées aux 2° à 15° de l’article L131-2 ;
  • Les créanciers pour les faits mentionnés au 2° de l’article L131-14 ;
  • Les chefs de service de l’inspection générale de l’administration, l’inspection générale des affaires sociales, l’inspection générale des finances et des inspections ministérielles ;
  • Les commissaires aux comptes des organismes soumis au contrôle de la Cour des comptes et des chambres régionales et territoriales des comptes ;
  • L’Agence française anticorruption.

Le procureur général près la Cour des comptes peut également s’auto-saisir.

Le ministère public apprécie les suites à donner au déféré.

L’article L142-1-2 du code des juridictions financières prévoit que le ministère public près la Cour des comptes apprécie les suites à donner aux déférés dans un délai de deux mois (article R.142-1-1 du Code des juridictions financières).

Le ministère public peut :

  • Soit engager les poursuites contre la ou les personnes ayant commis les faits allégués. Le cas échéant, le ministère public prend un réquisitoire, contre une personne dénommée ou non dénommée.
  • Soit ne pas engager de poursuites et classer l’affaire.

Saisine de la Cour des comptes par le ministère public.

Le ministère public saisit la Cour des comptes.

La Cour des comptes ne peut être saisie après l’expiration d’un délai de cinq années révolues à compter du jour où a été commis le fait susceptible de constituer une infraction (article L142-1-3 du Code des juridictions financières).

Partie 2 : Instruction.

Désignation d’un ou plusieurs rapporteurs par la Cour des comptes.

Conformément à l’article L142-1-4 du Code des juridictions financières, le président de la chambre du contentieux désigne un ou des magistrats chargés de l’instruction des faits et des pièces figurant au réquisitoire. Ces magistrats mènent l’instruction à charge et à décharge, de manière indépendante.

Cette désignation marque l’ouverture de l’instruction.

Envoi de l’ordonnance de mise en cause.

Le magistrat chargé de l’instruction prend une ordonnance de mise en cause contre chaque personne visée (article R142-2-3 du Code des juridictions financières).

Les ordonnances de mises en cause ne sont pas susceptibles de recours. Elles sont notifiées aux personnes mises en cause et accompagnées du réquisitoire introductif (article R142-2-3 du Code des juridictions financières).

Les personnes mises en cause peuvent, à tout moment de l’instruction, accéder au dossier de l’affaire et produire des documents et des observations écrites (article R142-2-5 du Code des juridictions financières).

Questionnaires/ auditions des témoins et des personnes mises en cause.

Conformément à l’article R142-2-4 du Code des juridictions financières, le magistrat chargé de l’instruction peut auditionner ou questionner oralement ou par écrit, de sa propre initiative ou à leur demande, tous témoins et toutes personnes mises en cause ou susceptibles de l’être.

Ordonnance de renvoi.

Le magistrat chargé de l’instruction prend une ordonnance de règlement dans laquelle il présente les résultats de ses investigations, en mentionnant les éléments à charge et à décharge, ainsi que ses propositions de suite à leur donner (article R142-2-12 du Code des juridictions financières).

Cette ordonnance de règlement clôt l’instruction (article R142-2-12 du Code des juridictions financières).

Le ministère public décide des suites à donner.

À la clôture de l’instruction, le ministère public décide, dans un délai de trois mois :

  • Soit de renvoyer l’affaire à la chambre du contentieux. La personne renvoyée peut, dans un délai de deux mois suivant la décision de renvoi, produire un mémoire écrit ;
  • Soit de demander un complément d’instruction ;
  • Soit de classer l’affaire.

Le ministère public peut, en présence d’éléments nouveaux ou de pièces versées au dossier postérieurement à la décision de renvoi, saisir la chambre du contentieux d’un réquisitoire supplétif jusqu’au jour de l’audience publique (article R142-2-13 du Code des juridictions financières).

Rédaction et communication du mémoire en défense.

En principe, la personne renvoyée peut, dans un délai de deux mois suivant la décision de renvoi du Procureur, produire un mémoire écrit (article R142-2-13 du Code des juridictions financières).

Partie 3 : Jugement.

Tenue d’une audience.

En principe, les audiences sont publiques (article 142-1-6 du Code des juridictions financières).

À titre exceptionnel, si la sauvegarde de l’ordre public ou le respect de l’intimité des personnes ou de secrets protégés par la loi l’exige, le président de la formation de jugement peut décider que l’audience aura lieu où se poursuivra hors de la présence du public (article L142-1-6 du Code des juridictions financières).

La présence des personnes mises en cause lors de l’audience.

Conformément à l’article R142-3-2 du Code des juridictions financières, une personne renvoyée peut, par lettre adressée au président de la formation de jugement, demander à être dispensée de se présenter en personne à l’audience et se faire représenter par son avocat.

Dans le cas où la personne renvoyée, n’a pas comparu en personne à l’audience et n’a pas demandé à s’y faire représenter par son avocat, elle peut régulièrement être jugée par la formation de jugement (article R142-3-2 du Code des juridictions financières).

Les témoins.

Les témoins sont entendus à l’audience à l’initiative du ministère public ou à la demande de la personne renvoyée. Toutefois, le président de la formation de jugement peut autoriser les témoins qui en ont fait la demande, assortie de justifications utiles, à ne pas comparaître personnellement à l’audience.

L’article R142-3-4 du Code des juridictions financières prévoit que lorsque les personnes renvoyées ou les témoins ne peuvent se rendre à l’audience publique, le président de la formation de jugement peut les autoriser à y assister par un moyen de communication audiovisuelle permettant de s’assurer de leur identité et garantissant la qualité de la transmission ainsi que la confidentialité des échanges avec leurs avocats.

Communication de la date du jugement.

Quelques jours avant que la décision juridictionnelle soit rendu, le greffe de la Cour des comptes communique aux parties la date du jugement.

Publication du jugement.

Les jugements rendus par la Cour des comptes sont publics.

Ils sont mis à la disposition du public à titre gratuit sous forme électronique. En fonction de la particularité de l’affaire, les arrêts peuvent faire l’objet d’une publication au Journal officiel (article L142-1-11 du Code des juridictions financières).

Les nom(s) et prénom(s) des personnes physiques mentionnées dans la décision, lorsqu’elles sont parties ou tiers, sont occultés préalablement à la mise à la disposition du public. De plus, lorsque la divulgation de l’arrêt est de nature à porter atteinte à la sécurité ou au respect de la vie privée des personnes mentionnées ou de leur entourage, il est également occulté tout élément permettant d’identifier les parties, les tiers, les magistrats et les membres du greffe (article L142-1-11 du Code des juridictions financières).

Partie 4 : Appel.

Appel devant la Cour d’appel financière.

En cas d’insatisfaction, les parties peuvent faire appel afin de contestation la décision rendue par la Cour des comptes.

Depuis le 1ᵉʳ janvier 2023, l’appel peut être formé par le ministère public ou par la personne renvoyée en première instance devant la Cour d’appel financière (article R142-4-1 du Code des juridictions financières).

L’appel doit être formé dans le délai de deux mois à compter de la notification de l’arrêt rendu par la chambre du contentieux (article R142-4-4 du Code des juridictions financières).

Pour les personnes domiciliées en Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique, à La Réunion, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin, à Mayotte, à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna et en Nouvelle-Calédonie, ce délai est augmenté d’un mois. Ce qui porte le délai d’appel à trois mois.

Pour les personnes domiciliées à l’étranger, le délai d’appel est augmenté de deux mois. Ce qui porte le délai d’appel à quatre mois.

L’article R142-4-5 du Code des juridictions financières précise que la date permettant d’apprécier le respect du délai de recours contentieux est la date d’enregistrement de la requête au greffe de la cour d’appel financière.

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